lundi 14 mars 2011

Fief de la Culture







Quelques marques encore existantes des limites du fief de la Culture ou de la Couture-Saint-Gervais.

M. Lucien Lambeau donne lecture de la note ci-après :

On conviendra qu'il n'est pas banal de rencontrer aujourd'hui encore, cent vingt-sept ans après la Révolution, les marques d'un fief, censive ou seigneurie de l'ancien régime, toujours en place et gravées aux encoignures de certaines maisons du vieux Paris.
Nous en signalons quatre ayant servi à limiter jadis le fief de la Couture Saint-Gervais, appartenant aux Dames religieuses Hospitalières de ce nom, lequel fief serait approximativement circonscrit aujourd'hui par les rues de Turenne, de la Perle, de Thorigny et Vieille-du-Temple (1).
Deux de ces marques sont gravées au coin des rues de Thorigny et des Coutures-Saint- Gervais, sur l'hôtel de Juigné, l'une sur la première rue, l'autre sur la seconde.


Les deux autres se trouvent au coin des rues de Thorigny et Debelleyme.
Les deux premières sont dans un état de parfaite conservation, les murs de l'immeuble étant restés dans leur état naturel, sans avoir jamais été peints et badigeonnés, ce qui évita aux inscriptions le remplissage par le mastic et la couleur.

Il n'en est pas de même pour les deux autres, encore parfaitement visibles cependant, mais qui, victimes d'un grand nombre de ravalements, sont aujourd'hui complètement empâtées.



Les marques dont il s'agit, gravées en creux dans la pierre même, se composent d'une croix dont les quatre pointes sont prolongées des quatre lettres majuscules ci-après : F, au sommet; C, à gauche; S, à droite; G, en bas.
Ces lettres, pensons-nous, doivent s'interpréter de la façon suivante :

F : fief.
C : couture.
S : Saint.
G : Gervais.

La marque entière mesure environ 0 m. 30 de hauteur sur 0 m. 15 de largeur; elle est gravée à 1 m. 70 ou 2 mètres environ du sol, c'est-à-dire à peu près vis-à-vis des yeux du passant.
Les Archives nationales conservent un petit plan manuscrit du fief ou de partie du fief dont il s'agit, portant le libellé ci-après :Plan du fief de Mesdames de S. Gervais suivant les croix gravées sur les murs.
Ce document n'est pas daté, mais paraît avoir été établi au XVIIIe siècle II est intéressant en ce sens qu'il indique par des croix, les encoignures des rues sur lesquelles étaient gravées les marques limitant le fief des religieuses. Nous y retrouvons naturellement les quatre inscriptions que nous venons de signaler.
Une autre curiosité que présente ce plan est qu'il contient, dans sa marge, le dessin même de ces marques, précédé de la mention explicative ci-après :

Figure des inscriptions tracées sur les lignes séparatives du fief.


Disons en passant que le fameux et admirable hôtel Le Camus, dit hôtel Salé, et en dernier lieu hôtel de Juigné, était situé sur ledit fief. Nous relevons dans un état des maisons de cette censive les mentions suivantes le concernant :
« Vieille rue du Temple, maison originairement jeu de paulme, présentement le petit hôtel Le Camus, à M. le marquis de Juigné. « Rue de Thorigny, une maison sise dite rue, appelée l'hôtel Salé, bâtie sur un terrain de 973 toises, contrat du 15 mai 1636 ; doit par an 12 livres 3 sols 4 deniers de cens; dernière déclaration du 23 décembre 1757, devant Me de La Leu, notaire, pour Mre Philippe Thiroux de Chammeville; nouveau censitaire : M. le marquis de Juigné (2) ».
En signalant à la Commission l'existence de ces marques de censive parisienne, nous voudrions lui demander de les prendre sous sa protection et d'inviter l'Administration municipale à lui prêter son appui en cette circonstance.
Le document épigraphique dont il s'agit présente un intérêt aussi grand, pour l'histoire de Paris, que celui qui s'attache aux anciennes inscriptions des rues gravées sur pierre de liais, aux marques de cote pour les voies des faubourgs, dont nous avons parlé dans la dernière séance, et aussi aux bornes- limites de 1724-1726 dont il a été si souvent question.
Toutes ces pierres gravées, qui jadis avaient une raison d'être, urbaine ou fiscale, signes et points de repère employés par nos anciennes administrations édilitaires et par les seigneuries qui se partageaient la ville, méritent, selon nous, d'attirer la bienveillante attention de l'Administration sur leur conservation.
D'autres points de repère analogues, ayant appartenu à diverses censives, existent encore à Paris, en très petit nombre, il est vrai. Nous pouvons signaler celui de la Censive de Sainte Catherine du Val des Écoliers, composé des lettres majuscules S. C. fortement gravées à la base de la tourelle quadrangulaire de l'hôtel Lamoignon, au coin des rues des Francs-Bourgeois et Pavée.

Et aussi celui de la Censive de Sainte Geneviève, composé des lettres STE GVE, gravées dans le pied-droit gauche de la porte charretière de l'immeuble situé rue Saint-Julien-le Pauvre, 5.
En ce qui concerne les marques faisant l'objet de la présente communication, nous proposons d'annexer au procès-verbal de la séance le plan dont il a été question.
Nous soumettons également à la Commission le vœu ci-après :
« La Commission du Vieux Paris émet le vœu que l'Administration, après entente avec les propriétaires, fasse nettoyer soigneusement et protéger par un filet bleu, comme pour les anciens noms de rues, les quatre marques du fief de la Couture-Saint-Gervais, gravées, deux, au coin des rues de Thorigny et des Coutures-Saint-Gervais, deux au coin des rues de Thorigny et Debelleyme. »

Lucien LAMBEAU.

La Commission décide l'annexion du plan dont il s'agit au procès-verbal de la séance. Le vœu est ensuite adopté.
La séance est levée à cinq heures trois quarts.
(1) Le fief est bien désigné sous ce vocable dans
une pièce de la liasse.
(2) Archives nationales. S. 6132.


LETTRES PATENTES DU ROY Louis XIV. en faveur de l'hospital Saint Gervais.

Louis par la grâce de Dieu roy de France & de Navarre, à tous presens & à venir, salut. Nos bien amées les prieure & religieuses de l'hospital sainte Anastasie, autrement de saint Gervais, en nostre ville de Paris nous ont fait remontrer que cet hospital ayant esté fondé il y a plus de cinq cens ans par la piété & dévotion de Garin & Harcher son fils bourgeois de Paris, afin d'y recevoir les pauvres, & les y nourrir & assister par hospitalité, cette fondation auroit esté autorisée par le roy Louis le jeune lors régnant, & Robert de France comte de Brienne frère dudit seigneur roy, lequel en faveur de cet establissement remit un droit de cens qui luy appartenoit sur la maison où cet hospital fut basti dans son origine. Et d'autant que le gouvernement dudit hospital fut mis premièrement entre les mains d'un maistre & des frères qui en administroient les revenus, & prenoient le soin des pauvres qui y estoient receûs, sous l'autorité & la jurisdiction des evesques de Paris, seroit arrivé par la suite des temps que ce maistre & ces frères ayans malversé dans leurs administrations, & mesme fait des alliénations considérables du fonds des pauvres & dissipé une partie des titres dudit hospital, les choses furent portées à ce point qu'il fallut les poursuivre en justice pour les faire punir de leurs dereglemens ; tellement qu'au lieu d'un maistre & des frères qui y estoient autrefois, l'evesque de Paris superieur spirituel dudit hospital fut obligé d'y establir des religieuses de l'ordre de saint Augustin, qui ont pris soin des pauvres jusques à présent, & exécuté la fondation de cet hospital avec l'edification du public. Mais d'autant qu'entre les biens qui ont esté aumosnez audit hospital, est un fief appellé de la Cousture saint-Gervais, qui consistoit en quelques arpens de terres alors assis hors l'enceinte de la ville de Paris, que les religieuses qui ont precedé les exposantes, faisoient valoir par leurs mains, & qu'elles ont depuis donné à cens & à rentes foncières à plusieurs particuliers, ainsi qu'il est justifié par les anciens baux à cens , ensaisinemens, titres nouvels, sentences & autres titres qui font voir que cet hospital jouît desdits droits de cens &rentes foncières depuis plus de trois cens ans jusques à présent, elles auroient eu recours à nous, pour nous supplier de les prendre sous nostre protection spéciale, & leur accorder nos lettres de confirmation à ce nécessaires. SÇAvoir Faisons que nous estant particulièrement informez du zèle & de l'application desdites prieure & religieuses au soulagement & service des pauvres ; desirans par ces considérations les traiter favorablement, & suppléer à la perte qui a pu estre faite de quelques-uns des anciens titres des fonds appartenans audit hospital : après avoir fait voir à nostre conseil les extraits des baux à cens & rentes, plusieurs contracts de ventes & eschanges, titres nouvels, ensaisinemens , sentences & autres actes de justice des années 1341. 1358. 1425. 1441. 1460. 1475. 1477. I483. 1491. 1506. 1513. 1520. 1563. 1571. 1648. 1649. 50. 51. 53. 55. 58. 59. 60. 61. 63. & 1665. par lesquels il appert desdites terres & maisons qui sont en la censive desdites exposantes, à cause de leur fief de la Cousture-saint-Gervais & ses dépendances, le tout cy attaché sous le contre- scel de nostre chancellerie ; avons iceux, en tant que besoin est ou seroit, de nostre grâce spéciale confirmé, approuvé & ratifié, & par ces présentes signées de nostre main confirmons, approuvons & ratifions ; voulons & nous plaist qu'ils leur tiennent lieu comme faisoit & pouvoit faire le titre primordial de leur establissement, donations & acquisitions qu'elles & leurs devanciers audit hospital ont faites, tant dudit fief de la Couture qu'autrement : à la charge toutesfois de relever de nous, ainsi qu'elles ont accoutumé, sans néanmoins estre obligées de nous payer aucuns droits & devoirs, desquels si elles estoient nos redevables, nous leur en avons fait & faisons don par ces présentes ; à condition de continuer leurs soins pour le secours & service des pauvres , ainsi qu'elles y sont tenuës par leurs statuts & par la fondation dudit hospital, & de faire dire annuellement à perpétuité le jour de saint Louis une messe & faire prières à Dieu pour la santé & prospérité de nostre personne & de ceux de nostre maison royale, & pour le bien de nostre estat. Si donnons en mandement ànos amez & seaux conseillers les gens tenans nostre cour de parlement & chambre des comptes à Paris, presidens & trésoriers de France & chambre du trésor audit lieu, & à tous autres nos justiciers & offìciers qu'il appartiendra que ces présentes ils fassent, chacun en droit soy, enregistrer, & du contenu jouïr & user lesdites suppliantes pleinement & paisiblement : ne permettant qu'il leur soit fait ou donné aucun trouble ou empeschement au contraire. Car tel est nostre plaisir. Et afin que ce soit chose ferme & stable à toujours, nous y avons fait mettre nostre scel. Donné à saint Germain au mois d'Avril l'an de grâce M. Dc. LXXI. & de nostre règne le.XXVIII Signé, LOUIS ; & sur le reply : Par le roy , Le Tellier, avec paraphe.
Registrées, oüy le procureur general du roy, pour estre exécutées & jouïr par les impétrantes des lettres & contenu en icelles, selon leur forme & teneur. A Paris en parlement le XIII. Aoust M. D. C LXXI. Signé , Durivet, avec paraphe.
Registrées en la chambre des comptes , oüy le procureur general du roy, pour jouïr par les impétrantes de l'effet & contenu en icelles, selon leur forme & teneur. Le IX. jour de Février M. D. C. LXXII. Signé, Guitonneau, avec paraphe.
Registrées au bureau des finances de la généralité de Paris, oüy le procureur du roy, pour jouïr par les impétrantes de l'effet & contenu en icelles, selon leur forme & teneur. Le xv. May M.D.C.LXXIII. Signé , DE Santeul , Sallé Dufour, DE La Barre, Robineau, Rabouyn , avec paraphe, & plus bas : Par mesdits sieurs , De Fenis., avec paraphe.
Enregistrées au greffe de la chambre du trésor, oüy & ce consentant le procureur du roy, pour y avoir recours quand besoin, & jouïr par les dames impétrantes de l'effet & contenu en icelles, selon leur forme & teneur ; suivant le jugement de ce jourd'huy XXI. Octobre M. DC. LXXIII. Signé, CHERON, avec paraphe. Pris sur une copie manuscrite.

Histoire de la Ville de Paris, Volume 4, 1725

Pour compléter les informations sur ces fiefs parisiens, aller sur Paris Secret et Insolite.



jeudi 3 mars 2011

Régions parisiennes



rues créées en 1626 par l'entrepreneur Charlot. 3e ardt.

L'autre place qui avoit été projetée par Henri IV auroit été appelée la Place de France, à cause que chaque rue y aboutissant auroit porté le nom d'une des provinces du royaume. Ce prince, pour en arrêter le dessin, se transporta sur le lieu. Il y en a même qui veulent que c'est lui qui en étoit l'inventeur, et qu'en sa « présence Alaume et Châtillon ses ingénieurs en tracèrent le plan et l'élévation. Le « marché en fut fait avec Carel et les autres entrepreneurs, à la charge d'y travailler  incessamment, et avec ordre au duc de Sully d'y tenir la main. Pour ce qui est des rues qui devoient y conduire, le dessin en partie étoit déjà commencé.
La place auroit été faite en demi-cercle, terminée par les remparts, et située presque vis-à-vis la place du Calvaire, où se viennent rendre la vieille rue du Temple et celle de Saint-Louis. Sa profondeur devoit être de quarante toises (240 pieds), sa longueur de quatre-vingts (480 pieds), sa circonférence de cent trente-neuf (834).
Dans les murailles de la ville, il y auroit eu une porte, appelée la Porte de France, ayant en vue le milieu de la place, entre deux grands corps de logis bâtis de brique et de pierre, qui non-seulement auroient couvert les remparts, mais encore les angles contraints du plan, par le moyen des halles et des marchés qu'on y auroit construits.
On seroit entré (dans la place) par huit rues, larges de six toises (36 pieds), bordées de logis uniformes, lesquelles auroient eu pour noms : Picardie, Dauphiné, Provence, Languedoc, Guienne, Poitou, Bretagne, Bourgogne, noms des huit plus grandes provinces de France. Elle auroit été environnée de sept pavillons doubles, à trois étages, de brique et de pierre, de treize toises de face, avec un portique au premier étage (rez-de-chaussée), composé de sept arcades de pierre, deux tourelles en saillie dans les angles, trois lucarnes faites en croisées dans le comble, et un dôme octogone sur le faite de la couverture.
A quarante toises aux environs, il y auroit eu un demi-cercle de sept rues, concentriques, à la demi-circonférence de la place et des portiques de ses pavillons. Ces rues se seroient appelées : Brie, Bourbonnois, Lyonnois, Beauce, Auvergne, Limosin, Périgort, qui composent les gouvernements moins considérables.
Les rues qui auroient conduit aux premières et aux secondes, et passé tout au « travers, devoient se nommer : Saintonge, la Marche, Touraine, le Perche, Angoulême, Berri, Orléans, Beaujolois, Anjou. » (1)
C'est bien là la pensée la plus nationale, la plus française qu'aucun souverain ait jamais conçue. Henri appelait la nouvelle place Place de France, comme il avait, dans les mêmes idées, changé le nom de Collège Royal en celui de Collège royal de France. La royauté qui s'était produite encore et mise en évidence à la place Royale, à la place et à la rue Dauphine, s'effaçait ici et faisait place au pays. Toutes les provinces, toutes les parties du territoire comparaissaient, étaient représentées dans cette sorte de Panthéon national : un grand monument, en frappant les imaginations et les yeux, en donnant un corps aux idées purement morales et politiques, était employé à les répandre, à les propager parmi le peuple, dans ce qu'elles avaient de plus utile et de plus élevé.
(...)
Ce projet, dans son vaste et majestueux ensemble, périt avec Henri IV. Quand Richelieu, devenu maître des affaires, y mit la main en 1626, il n'en prit que les petites parties. La Place de France fut abandonnée, et des vingt-quatre rues dont Henri IV l'avait percée, ou qu'il avait tracées aux environs, le ministre n'en fit ouvrir que onze, les rues de Poitou, Bretagne, Beauce, Saintonge, la Marche, Touraine, le Perche, Berri, Orléans, Beaujolais, Anjou.

(1) Sauval. Histoire et Recherches des antiquités de la ville de Paris, Tome 1, p. 632.

Auguste Poirson, Histoire du règne de Henri IV, Paris, 1866





Lettre sur le changement du nom des rues de Paris.

J'ai passé, Messieurs, cinq années a Paris ; dans cet intervalle, j'y ai fait quelques connaissances : cependant, quoiqu'il n'y ait pas tout à-fait le même tems que j'en suis de retour, j'ai oublié le nom de la plupart des rues de cette ville, que je connoissais parfaitement ; j'ai perdu le souvenir des adresses de quelques uns de mes amis. Cet oubli vient d'un défaut de mémoire de ma part, ou plutôt ne seroit il pas la suite de la barbarie du plus grand nombre des noms des rues de cette ville ; car quelle idée peuvent vous laisser dans l'esprit les noms de Mouffetard, de la Truanderie, des Ecouffes, etc. Je veux croire que ces mots ont signifié quelque chose dans le tems : mais avouez qu'ils sont aujourd'hui bien baroques : il y a cependant une infinité de rues dans le même cas.
Un second inconvénient, c'est qu'il y en a qui portent le même nom dans deux & même trois quartiers différens, telles que les rues d’Enfer dans l'Isle, près des Chartreux & dans la nouvelle France, les rues de St. Louis, près le palais, au Marais & au quartier St. Honoré, les rues Traversière, du Battoir, des Double Portes & une foule d'autres ; ce qui nécessite encore à retenir, outre le nom de la rue, celui du quartier. D'autres rues portent le même nom dans le même quartier, & sont distingués par l'épithéte de vieilles, de neuves, de grandes ou de petites ; quelques unes conservent le même nom dans l'espace de demi lieue, comme les rues St. Honoré, de l'Université, de St. Denis, tellement que vous n'êtes pas plus avancé en sachant le nom de la rue, si vous ne retenés celui de quelque édifice voisin ; tandis que d'autres enfin ont à peine trois maisons dans leur étendue comme les rues Trop-Va-Qui-Dure, de Vuide Gousset, du Hurepoix, &c.
Si ces inconvéniens embarrassent les Parisiens qui ont continuellement sous les yeux Ies noms & les différences de ces rues, jugés des difficultés qu'ils occasionnent aux Provinciaux qui ont des relations dans cette ville. N'y aurait-il pas un moyen plus simple de distinguer les rues de Paris, & qui fut à la portée de tout le monde ? Je crois en avoir imaginé un, & je me hâte, Messieurs, de vous en faire part, afin que si vous pensés qu'il mérite d'être consigné dans votre Journal, ceux de qui dépend cette reforme en soient instruits par cette voye.
Ne pourrait-on pas envisager la ville de Paris comme la carte géographique du royaume ; chaque quartier & la principale rue prendraient le nom d'une province, & les autres rues de ce quartier, celui des villes, fleuves, montagnes de cette province ; par exemple, l'Isle du Palais serait nommé l’Isle de France, la rue qui communique du pont Notre-Dame au Petit-Chatelet, en porterait le nom, & les autres rues celui des principales villes de cette province : les quartiers qui sont dans les fauxbourgs St. Germain & St. Marceau, les noms des provinces meridionales à l'Isle de France ; ceux de St. Honoré & du Marais, des septentrionales. Pourvu que ceux qui seraient chargés de cet ouvrage, fussent exacts dans l'application du nom, ne serait-ce pas un moyen d'apprendre ou de retenir la géographie du royaume ou même des états voisins ? car rien n’empêcherait que les fauxbourgs ou leurs extrémités ne portassent les noms des royaumes étrangers , &c.
J'avoue qu'il faudrait quelque tems pour deshabituer le public de donner à une rue son ancien nom ; mais ne pourrait-on pas afficher le nouveau nom d'un côté de la rue, tandis qu'on laisserait subsister, pendant quelque tems, l'ancien du côté opposé ?

Impasse du Boeuf, 1er ardt.

CHAPITRE CXI

 
Les écriteaux des rues.

 
Les écriteaux du nom de chaque rue ne datent que de 1728 : avant cette époque, la tradition désignait chaque rue. On avait commencé par une plaque de fer-blanc ; le tems & la pluie en effaçaient les caractères ; aujourd'hui ils sont gravés dans la pierre même.
On verra à la place de la nouvelle salle de la comédie française, les rues de Corneille, de Racine, de Molière, de Voltaire, de Crébillon, de Regnard ; ce qui scandalisera d'abord les échevins (il faut s'y attendre), comme en possession de la glorieuse & antique prérogative de donner seuls leurs illustres noms à des rues. Mais peu-à-peu ils s'accoutumeront à cette innovation, & à regarder Corneille, Molière & Voltaire, comme les compagnons de leur gloire. Enfin, la rue Racine figurera à côté de la rue Babille, sans trop étonner les quarteniers, les dizeniers, & autres officiers de l'hôtel-de-ville.
L'ANNÉE littéraire a fait dernièrement une assez bonne plaisanterie, en disant que derrière la nouvelle salle de spectacle, on trouverait le cul-de-sac la Harpe. Cela est gai, point méchant ! l'auteur des Barmecides devrait lui même en rire : car c'est toujours quelque chose en passant dans ce monde, que de donner son nom à un cul-de-sac ou à une impasse.
M. de Voltaire a eu beau prêcher pour ce mot impasse, on ne s'en est point servi ; & l'on continue à dire le cul-de-sac du fort aux dames, le cul-de-sac des feuillantines, le cul-de-sac de Jérusalem, le cul-de-sac du petit Jésus, le cul-de-sac des quatre vents, etc. 


rue Chapon, 3e ardt.
On avoit commencé à numéroter les maisons des rues ; on a interrompu, je ne sais pour quoi, cette utile opération. Quel en seroit l'inconvénient ? Il serait plus commode & plus facile d'aller tout de suite chez M. un Tel, N°. 87, que de trouver M. un Tel au cordon bleu, ou à la barbe d'argent, la quinzième porte cochère à droite ou à gauche après telle rue ; mais les portes cochères, dit-on, n'ont pas voulu permettre que les inscripteurs les numérotassent. En effet, comment soumettre l'hôtel de M. le conseiller, de M. le fermier-général, de Monseigneur l'évêque à un vil numéro, & à quoi serviroit son marbre orgueilleux ? Tous ressemblent à César, aucun ne veut être le second dans Rome : puis une noble porte cochère se trouverait inscrite après une boutique roturière. Cela imprimerait un air d'égalité qu'il faut bien se garder d'établir. Bientôt sur les petites affiches, le convoi d'un fermier qui sera décédé, ne se trouvera plus à côté de celui d'un Marquis son voisin dans la sépulture. L'on fera une petite barre pour les distinguer, & cela a été proposé !
Louis Sébastien Mercier, Tableau de Paris, nelle éd.1782

rue du Perche, 3e ardt.


Noms des rues changés

J’ai lu un projet de géographie, dont Paris serait la carte, et les fiacres les professeurs. Certes, j'aimerais mieux que Paris fût une carte de géographie, qu’un volume du calendrier romain, et les noms des Saints, dont les rues sont baptisées, ne peuvent être mis en comparaison ni pour, l'harmonie, ni pour l’utilité, avec les noms de villes qu'on propose d'y substituer : ainsi le faubourg S. Denis s'appellerait, dans cette supposition, le faubourg de Valenciennes ; le faubourg S. Marceau, le faubourg de Marseille ; ainsi la place de Grève s'appellerait place de Tours ou de Bourges, etc.
Plaisanterie à part, si les noms des rues doivent subir un changement, celui-ci est plus raisonnable et mieux senti que celui que la barbarie et la rage révolutionnaire leur ont fait éprouver en supprimant le mot de Saint.


Le "St" de "saint" a été martelé en 1793

Les auteurs de ce dernier changement ont cru porter un coup mortel à la religion catholique en lui ravissant l'antique honneur de consacrer nos rues étroites et dégoûtantes ; mais c'était une précaution d'enfant qui ferme les yeux en traversant des halliers. Ces noms de Saints, depuis si long-temps inconnus
et depuis plus long-temps appliqués aux rues de Paris, ne rappelaient pas plus les apôtres ni les martyrs de la religion catholique, que la rue du Pélican ne rappelle à ceux qui la traversent les mœurs de l'oiseau lourd et pêcheur dont elle porte le nom.
Quel est celui d'entre nous, quel est le dévot même qui, en passant dans les rues S. Honoré ou S. Antoine, se soit avisé du nom ou des faits de l'habitant des cieux qu'elles rappellent ? Nous passions dans ces rues, comme les Anglais passent dans la rue S. Paul à Londres ; les Turcs dans la rue Ste. Sophie à Constantinople,  les Romains dans la rue Flaminia à Rome, sans qu'aucun d'eux songe jamais ou, à Flaminius, ou à Ste. Sophie, ou à S. Paul. Il  y avait un moyen de nous y faire penser, nous autres Français, c'était de nous le défendre, et c'est le sage parti qu'ont pris nos modernes iconoclastes. Outre l'hiatus barbare introduit dans la langue, et introduit par la suppression du mot Saint dans les rues Honoré, Roch, Antoine, etc., ils sont allés directement contre leur but, en nous plaçant entre les douceurs de l'habitude et la crainte de passer pour aristocrates, an nous forçant, par cela même, à nous rappeler sans cesse et nos préjugés et leurs motifs : aussi, n’ya-t-il pas un républicain raisonnable qui attache aujourd'hui la moindre importance à ce sujet, et s'il fallait opérer un changement dans les rues de rues de Paris, il n'y a pas un homme sensé qui ne préférât celui du géographe dont nous avons parlé, lequel porte au moins avec lui un moyen d'instruction et un caractère d'originalité.
 
Louis Sébastien Mercier, Le Nouveau Paris, 1800


rue Vide Gousset, 2e ardt.
CHAPITRE XIX.

Noms des Rues.

Je ne connais rien de plus ridicule, de plus incohérent que les noms des rues, places et impasses ou culs-de-sac de Paris. Prenons au hasard quelques-uns de ces noms, dans un des plus beaux quartiers, et nous allons remarquer cette incohérence, cette bizarrerie. J'arrive par la rue Croix-des-Petits-Champs ; je traverse la place des Victoires, j'entre dans la rue Vuide-Gousset, qui me conduit au passage des Petits-Pères, d'où il n'y a qu'un pas pour aller au Palais-Égalité.
Quel salmigondis ! Le premier nom rappelle l'objet d'un culte et un aspect champêtre ; le second offre des triomphes militaires et le troisième, un guet-apens ; le quatrième, le souvenir d'un sobriquet donné à un ordre monastique ; et le dernier, un mot dont l'ignorance, l'intrigue et l'ambition ont tour-à-tour abusé.
Le ridicule de cet assemblage a été augmenté depuis quelques années par une foule de noms de circonstances. Comme c'est à ceux des hommes qu'on s'est attaché plutôt qu'aux idées saines et immuables, il s'ensuit que plusieurs rues, à Paris, ont changé trois fois de noms depuis dix ans, et ces baptêmes partiels n'ont fait qu'ajouter à l'incohérence qui existait.
Qui ne voit d'ailleurs que les noms anciens sont, pour la plupart, en contradiction avec la situation ou la destination actuelle de ces rues ?


rue du Cherche Midi, 6e ardt.
La rue des Fossés-Montmartre rappelle à-la-fois des fossés comblés depuis longtemps , et le Mont de Mars, aujourd'hui le mont des ânes : celle de Saint-Germain-des-Prés n'est plus au milieu des vastes prairies qui entouraient cette riche abbaye. Où sont les moulins qu'indique la rue de ce nom sur la butte Saint-Roch, ont ils existaient encore au milieu du 17e siècle ? Que sont devenus les revenans qui habitaient le château qui fut donné aux Chartreux pour y bâtir leur couvent ? -- Ces revenans ont disparu, et la rue d’Enfer les rappelle sans doute.
Je ne vois plus ni ces chambres données à de pauvres bourgeois, qui étaient francs d'impositions, ni le bâtiment plus vaste qui renfermait les lions de François 1er ; mais je passe encore quelquefois dans la rue des Francs-Bourgeois et des Lions-Saint-Paul.
Et cette rue Vuide-Gousset me rappellerait-elle qu'il y a soixante-dix ans on y volait en plein jour, si depuis trois ans le voisinage de la bourse n'en avait fait le rendez-vous des agioteurs en sous-ordre, qui lui conservent à si juste titre son ancien nom ?
Je ne vois plus ni Bons Enfans, ni le collège qu'ils habitaient dans la rue qui porte encore ce nom.
Enfin, puisqu''on a eu assez de pudeur pour effacer une partie du nom obscène que portait la rue Tire-Boudin, l'une de celles affectées dans le quatorzième siècle aux filles publiques, pourquoi n'aurait-on pas le courage de l'effacer tout-à-fait ? (1)
Mais, dira-t-on peut-être, il ne s'agit pas de toujours blâmer, de changer sans cesse, il ne faut pas suivre la marche trop commune depuis quelque temps d'abattre sans rétablir : offrez -nous un projet de dénominations raisonnables, stables, qui, sur-tout, fasse abstraction de toute opinion particulière. -- Je vous entends et j'ai prévu l'objection ; lisez le chapitre suivant. 


(1) Ce n'est pas seulement à Paris qu'on a conservé de sales et indécentes dénominations ; je pourrais en rapporter qui existent encore à  Bordeaux et dans d'autres villes, et qui présentent les idées les plus dégoûtantes.

CHAPITRE XX.

Projet sur les Dénominations à donner aux Rues de Paris,

Plus un projet embrasse de petits détails, plus l’idée principale doit en être simple. Si les plans les plus futiles en apparence renferment une idée juste et morale, ils peuvent faire éclore des conceptions plus heureuses.
On a vu dans le chapitre précédent le ridicule assemblage qu'offrent ces noms bizarres, donnés à différentes époques aux rues et places publiques. Il n'est pas. inutile d'observer qu'un étranger qui, en arrivant dans une ville, commence par tout juger sur les apparences, peut bien penser, en lisant ces dénominations incohérentes et insignifiantes, que les idées de ceux qui l'habitent ne sont pas mieux liées dans leurs raisonnemens ; et certainement, si plusieurs rues lui présentent des noms abjects ou obscènes, il sera fondé à croire à l'immoralité de ses habitans.
Que l'on donne à Paris le nom de capitale, ou que dans les divisions politiques et territoriales de la France on mette cette yille sur le même rang que le plus petit village, cela importe peu, puisque cette dénomination n'influe en rien sur l'opinion que les Français et les étrangers se sont faite de cette cité, le centre des arts et des sciences, dans le sein de laquelle se sont formés tant d'hommes qui ont honoré l'esprit humain.
Ainsi, quand je considère Paris et que je m'isole du point où je suis, du moment où j'écris je dois nécessairement chasser de ma mémoire cette foule d'événemens qui, à  diverses époques, ont fait de cette ville la sentine de tous les vices, le réceptacle de tous les crimes. On a oublié les détails des guerres de la ligue et de la fronde, qui ne se retrouvent plus que dans quelques histoires particulières ; mais l'Europe, le monde entier est plein des grands travaux qu'enfantèrent Corneille, Turenne, La Fontaine, Molière, Racine, Vauban, Fénélon, Perrault, et tant d'autres, qui environnèrent l'époque ou ils vécurent ensemble d'une auréole de gloire qui ne s'éclipsera jamais. 


rue de Poitou, 3e ardt.
J'ai donc considéré Paris comme le centre d'un vaste état et j'ai pensé qu'on pouvait exécuter un projet sur les dénominations à  donner aux rues sur cette idée, qui se lie aux principes d'unité, de simplicité, qui doivent être la base de tous les plans de ce genre.
Ce projet, d'ailleurs, est indépendant de tout système particulier, soit poliique, soit religieux ; ce qui le met à l'abri des haines, des changemens qu'amène trop souvent l'esprit de parti. Enfin, il a un avantage important, c'est qu'il se lie naturellement à une partie de l'instruction du peuple.
Ce plan n'a pas besoin de grands développemens pour être apprécié ; il suffit de l'indiquer, pour en faire concevoir l'ensemble.(1)
Il consiste à donner aux rues, impasses ou culs-de-sac, places et quartiers, les noms des villes, bourgs et villages de France, en conservant non seulement les positions générales, mais encore, autant qu'il est possible, les situations relatives de ces communes entre elles.
Les fleuves, les rivières, les montagnes, qui ont donné leurs noms aux divisions terriloriales et administratives, pourraient servir aux dénominations de ces longues rues qui traversent plusieurs quartiers. Comme le nombre des communes de France surpasse celui des rues de Paris, on prendrait de préférence les plus considérables, en ayant l'attention d'assimiler, autant que
les localités le permettraient, la longueur des rues à la grandeur des villes ou bourgs, c'est-à-dire à leur population. Soit que l'on suivît le même système pour les dénominations des places, ou qu'on en adoptât un autre, il serait facile et je tiens moins à  la gloriole d'être le premier à la publier, qu'à  celle d'éveiller l'attention du public et du gouvernement sur la nécessité de faire disparaître les noms obscènes qui salissent les coins de quelques rues et de  le faire concorder avec celui que je propose.
Je n'ignore pas que cette application des noms serait bien éloignée de l’exactitude qu'on pourrait mettre en bâtissant une ville sur une carte géographique ; mais il suffit, je pense, que les situations relatives soient bien observées, et les grandeurs des communes bien adaptées à celles des rues, pour offrir un ensemble tel que le voyageur puisse prendre une connaissance géographique de la France dans Paris, et, réciproquement, de Paris dans la France.
Je sais que tout ce qui renferme des idées nouvelles porte avec soi une sorte de réprobation, parce qu'on en a trop abusé ; mais je ne crains pas de dire que, malgré les imperfections inévitables d'une pareille carte figurée, l'habitant de Paris connaîtrait mieux la géographie de la France qu'un bon élève de cabinet j les objets qui frappent habituellement nos sens, s'imprimant mieux dans l'esprit que les meilleures théories.
Je crois inutile de m'étendre sur les avantages qui peuvent résulter de l'adoption de ce projet. Les hommes qui ont apprécié la force et le charme des souvenirs, les sentirons mieux que je ne pourrais les décrire. Quel plaisir pour l'habitant du Midi de retrouver, dans les noms des divers quartiers de Paris, ceux du lieu qui le vit naître, du canton où son épouse reçut le jour, du village où il passa ses premières années ; les noms aussi chers de ces communes honorées par des traits de vertu, de bienfaisance, d'héroïsme ! Toutes ces pensées, tous ces souvenirs, se lieraient à des idées morales, et exciteraient dans les Parisiens le désir si naturel de s'instruire des productions territoriales, de l'industrie des habitans des cantons dont les noms seraient souvent répétés : de ces questions facilement résolues, naîtrait sans doute un ensemble de connaissances utiles et agréables, et de communications plus intimes et plus durables.
Peut-être quelques personnes souriront à ce projet ; il excitera dans d'autres le rire de la pitié, je le sais. Que ces derniers s'en tiennent donc à  leur respectacle nomenclature ; que de la rue des Mauvais-Garçons ils aillent dans celle des Mauvaises-Paroles, ou de la Femme-sans-Tête, s'ils n'aiment mieux celle du Chat-qui-Pêche , ou Courtaud-Villain ; et si ces noms leur paraissent encore trop relevés, je les enverrai de la rue du Pet-au-Diable dans le cul-de-sac de la Fosse-aux- Chiens.


rue des Mauvais Garçons, 4a ardt.
Il y a environ cinq ans qu'une personne, sans doute bien intentionnée proposa de donner aux rues et impasses les noms des vertus et des sentimens généreux, sans réfléchir que cette nomenclature morale était trop bornée pour le grand nombre des rues qu'il y a à Paris ; mais une considération plus importante repousse ce projet, c'est qu'il faut bien se garder d'adopter dans les dénominations usuelles des méthodes métaphysiques si l'on ne veut risquer de jeter dans le peuple des idées fausses et même dangereuses. On sent que, dans ce projet, il y avait un certain ordre dans l'arrangement de ces dénominations ; par exemple, la rue de la Justice ou celle de l’Humanité y devait nécessairement conduire à  celle du Bonheur mais qui ne sait que, dans des temps de troubles, les partis changent la signification des mots qui peignent les idées les plus claires, les plus respectables ? Cest ainsi qu'on a vu l’épithète d'honnêtes gens changer de sens suivant les temps, et selon l'opinion des personnes qui l'ont employée, quoique son acception grammaticale soit aussi claire que précise.
En politique comme en morale, il ne faut jamais jouer avec les mots qui peignent des idées respectées de tous les peuples.
Si ce projet eût été adopté, on n'eût pas manqué de proposer à diverses époques de substituer aux noms des rues des vertus y des talens, du mérite y qui, dans le plan de l'auteur, menaient sans doute à celle des honneurs y ceux des vices, de l’impéritie et de l’impudence. Enfin, qui répond qu'alors on n'eût pas changé le nom de la rue de la Probité, qui devait traverser tout Paris, comme conduisant aux plus beaux quartiers, en celui de la rue de l’Intrigue, qui, suivant bien des gens, eût conduit à tout ?


(1) Une personne, à qui je faisais part de ce projet, m'observa qu'elle croyait avoir lu l'indication d'un plan à peu-près semblable. J'ignore; en effet, si d'autres ont eu avant moi cette idée, qui est si simple qu'elle peut être venue à beaucoup de monde. Il y a lieu de croire même que c’est un projet peu différent de celui-ci, qui fit donner, il ya plus d'un siècle, à la plupart des rues du Marais les noms des provinces de France. Quoi qu'il en soit, comme cette idée me parait bonne, je lui donne quelques developpemens.