Les derniers maraîchages de Seine-Saint-Denis résistent encore aux cités. Rue d'Amiens, Stains, Seine-Saint-Denis. |
Où nous découvrons le triste état de la Seine après le grand collecteur de Clichy, où la ville de Paris se débarrasse de matières encombrantes pour le plus grand bien des cultivateurs, où des indigènes hostiles au progrès se plaignent de nuisances, et où l'on emploie la pédagogie pour combattre les préjugés
Sur le soleil levant qui boit au loin les brumes,
Des plaines de Clamart au fort d'Aubervilliers,
Des côteaux d'Argenteuil jusqu'à Gennevilliers,
S'étend le grand pays -- La terre des légumes.
Des froids septentrions jusqu'aux rouges midis,
Si loin que, des remparts, peuvent porter les vues,
Ce n'est qu'un océan verdoyant de laitues,
De romaines, de choux et de petits radis.
C'est pour ce beau pays des primeurs printanières,
De l'orgueilleuse asperge et des melons dorés,
Des haricots nouveaux, des petits pois sucrés,
Qui va de Charenton jusqu'au grand port d'Asnières,
Que Bondy centralise, en ses bois odorants,
Tout ce que font Paris, ses faubourgs, ses banlieues,
Et que du sol mouvant jusques aux voûtes bleues,
Monte, comme un encens, l'odeur des excréments.
(...)
La terre des légumes : poème à la louange de l'engrais humain / K. de Monpétard, 1888
Un ancien bâtiment agricole. La construction semble être en plâtre et moellons, le gypse étant abondant dans ce secteur. Rue d'Amiens, Stains, Seine-Saint-Denis. |
SOCIÉTÉ DES AGRICULTEURS DE FRANCE - SÉANCE DU 17 MARS 1876.
RAPPORT présenté au nom de la 5e Section (Horticulture) sur les irrigations des plaines d'Asnières, Gennevilliers, etc., par les eaux d'égouts de Paris. — M. Michelin, rapporteur.
MESSIEURS,
Des engrais de toute sorte et d'une efficacité notoire sont produits dans les agglomérations urbaines, et la Société des Agriculteurs de France, qui a pour principe de mettre à profit tous les moyens propres à exciter la puissance végétative du sol, se préoccupe avec une vive sollicitude de recommander et de favoriser l'emploi des matières solides, comme des liquides, qui sont de nature à fertiliser les champs. Or, l'eau des égouts de la Ville de Paris, qui convergent vers cette rivière souterraine à laquelle on donne le nom d'égout collecteur et qui se jette dans la Seine un peu en aval du pont d'Asnières, contient de précieuses ressources dont il importe de tirer parti ; d'un autre côté, ces eaux, chargées de matières en suspension et en dissolution, envasent le lit de la Seine jusqu'à une grande distance et y entretiennent un foyer de putréfaction croissant sensiblement, menaçant les populations riveraines, qu'il prive de liquide potable et qu'il est urgent de faire disparaître en rendant au fleuve sa limpidité normale.
Cet élément d'insalubrité est bien connu ; il est là, sous les yeux des Administrateurs municipaux, des fonctionnaires de la Ville de Paris et des hommes éclairés par les sciences, qui tous s'en préoccupent et s'en inquiètent ; il donne lieu à des études et à des essais, non-seulement à Paris et en France, mais aussi à l'étranger ; il importe de trouver la solution du problème, c'est-à-dire d'absorber le cours d'eau infect, sans qu'il puisse devenir nuisible.
Dès le commencement a surgi l'idée que cette nappe d'eau, si riche en principes fertilisants, devait profiter à l'agriculture ; mais on ne fut pas de suite fixé sur la manière de l'employer. La Ville de Paris construisit des bassins où elle fit essayer la décantation ou la clarification par les procédés chimiques : on obtint un résidu solide, une sorte de terreau d'un bon usage ; mais le moyen, tantôt insuffisant pour la purification du liquide, tantôt trop lent et toujours trop dispendieux, fut jugé impraticable et définitivement abandonné au point que je n'ai plus à en parler.
L'arrosement immédiat du sol en culture avec l'eau prise à la sortie du grand canal parut à tous égards le modèle le plus économique, le plus efficace, le plus expéditif et j'ajouterai le seul qui pouvait s'appliquer sur une aussi vaste échelle, à la condition qu'il se trouvât à la portée du cours d'eau un terrain qui, par sa nature, fût propre à absorber le liquide et dont l'étendue fût en rapport avec le volume de la nappe. Tout cela s'est rencontré dans la presqu'île de Gennevilliers, à la sortie de l'égout ; l'arrosement y a été pratiqué depuis plusieurs années, et, partout fécondant et profitable, il a produit d'excellents résultats particulièrement sur les cultures maraîchères, qui demandent plusieurs récoltes au sol dans le courant de chaque année, et votre cinquième section, frappée des beaux produits qui ont été apportés depuis plusieurs années par les cultivateurs de la presqu'île dans les expositions de la Société centrale d'horticulture, éclairée par les nombreux rapports émanant de commissions des plus compétentes, qui ont suivi avec attention et intérêt les fruits de ces cultures, instruite elle-même par un certain nombre de visites que ses membres firent pendant l'année qui vient de s'écouler, votre cinquième section, dis-je, a cru qu'il était de son devoir de vous renseigner sur les richesses horticoles que procure une opération qu'avant tout la salubrité commande, comme d'appeler votre sanction si autorisée et vos encouragements sur un mode de culture qui doit être à la fois un bienfait au point de vue hygiénique et une source de bénéfices pour toutes les villes et les populations rurales qui les avoisinent.
(...)
Maraîcher au travail sur le secteur des Tartres, à la limite de Saint-Denis et de Pierrefitte-sur-Seine, Seine-Saint-Denis. |
Et pourquoi, Messieurs, ce déploiement de force motrice, lorsque les besoins actuels de la culture semblent satisfaits? La réponse est facile et découle de la situation intolérable créée par cette colossale concentration d'eaux insalubres faite au grand profit de l'assainissement de la capitale ; le mal n'est que déplacé ; il faut maintenant attaquer la masse liquide, la soustraire au fleuve que d'aucun droit on ne peut empoisonner ; il faut répandre sur une vaste étendue ces eaux riches d'engrais qui par une combinaison providentielle, d'impures et nuisibles qu'elles sont, perdront tout caractère malfaisant et seront une source de produits jusqu'ici inconnus, dont vous pourrez entrevoir la portée lorsque je vous citerai les prix de location par hectare, montant de 90 francs à 300 francs et jusqu'à 500 francs et au-dessus, et on peut dire en taux officiel à 500 francs, puisque, par un vote approbatif du Conseil municipal de Paris, des terrains appartenant à la ville ont été loués moyennant 550 francs par baux.
(...)
Je ne crois pas être exagéré en parlant de la grande variété des cultures entreprises ; on y voit en effet carottes, cerfeuil bulbeux, navets, pommes de terre, radis, salsifis, échalotes, ail, oignons, asperges, poireaux, choux, choux de Bruxelles, oseille, persil, salades, choux-fleurs, artichauts, fraisiers, fèves, haricots, pois, etc.; enfin, un terrain de plus d'un hectare employé par un marchand fleuriste de Paris, qui alimente son magasin de fleurs et de plantes d'ornement avec autant de succès que d'abondance.
Les récoltes obtenues sont remarquablement belles dans tous les genres ; la Section l'a constaté sur place ; elles sont en faveur à la halle de Paris, où elles ont un débouché facile et assuré ; elles ont été constamment suivies année par année par une Commission pour ainsi dire permanente de la Société centrale d'horticulture de France ; elles ont motivé pour les obtenteurs, dans de nombreuses Expositions, des récompenses de premier ordre ; aussi elles procurent facilement un produit brut qui oscille entre 4.500 francs et 8.000 francs l'hectare pour les cultures exclusivement maraîchères concentrées, et 3.500 francs et 5.000 francs pour les parcelles sises en plein champ et isolément consacrées aux cultures maraîchères.
(...)
On distingue au loin la tour hertzienne de Romainville. |
Parmi les végétaux que l'engrais liquide a permis d'introduire dans cette terre transformée, on peut citer l'osier, auquel on voit des pousses de trois mètres de hauteur, puis encore les asperges, qui, plus fortes en un an que partout ailleurs, fournissent leur récolte après deux ans de plantation. Enfin, à la séance du 27 juin 1872 de la Société d'horticulture, un cultivateur de la plaine avait apporté deux artichauts pesant chacun plus de deux kilogrammes et mesurant 0m,80 de tour, ceux de la même planche ayant pu être vendus 2 francs pièce.
(...)
Je crois, Messieurs, que tout autre détail serait superflu et que vous serez convaincus de l'utilité qu'obtiendront les encouragements que vous donnerez aux cultivateurs qui verront s'avancer dans leurs plaines ces petits cours d'eau chargés de principes fertilisants : ils auront besoin de confiance, et ils en puiseront une bien puissante dans l'opinion qu'énoncera la Société des Agriculteurs de France, qui proclamera une fois de plus ses principes sur l'utilisation des engrais.
(...)
Le Secrétaire de la 5e section, MICHELIN.
Nous retrouvons Francisque Sarcey dont nous avions déjà reproduit un texte sur les fosses mobiles. Critique et chroniqueur très lu, célèbre pour ce qu'il nommait son "gros bon sens", il mettait volontiers sa plume au service d'une cause progressiste qu'il défendait avec bonhomie et humour. Son texte est une version "grand public" des études et des rapports de la ville de Paris.
Il est bien probable que dans une dizaine d'années cette question des odeurs de Paris, qui nous a si fort tourmentés, n'existera plus : l'Administration en a trouvé la solution, une solution pratique et qui aurait pu être déjà réalisée si...
Ah ! Dame ! Il y a un si ! Vous croyez sans doute que je vais ajouter : si la réalisation n'en devait pas coûter si cher ; si elle ne devait pas grever d'un nombre énorme de millions le budget de la Ville et celui de l'État. Eh bien, non ! Les travaux seraient relativement peu dispendieux ; il y a plus , la Ville et l'État seraient sûrs, ou à peu près, de rentrer, au bout de quelques années, dans leurs avances. Non, ce n'est pas là que gît la difficulté.
Où donc est-elle ?
C'est que le projet des ingénieurs vient se heurter contre les répugnances d'un public qu'il faut absolument ménager. Ces répugnances, si on les examine à la lumière de la saine et froide raison, sont absurdes ; elles n'ont pas leur raison d'être. Mais, vous le savez tous, une répugnance, c'est affaire de sentiment, et le sentiment ne se raisonne pas. Qu'y a-t-il de plus tenace au monde qu'un préjugé ? La répugnance est un préjugé de la sensibilité, comme le préjugé est une répugnance de l'esprit.
C'est donc le public qu'il faudrait persuader.
Ah! si le public avait le temps ou le goût de lire des livres de science, d'écouter les hommes compétents, il aurait bien vite fait de s'éclairer ! Le préjugé céderait devant la clarté des déductions scientifiques et emporterait la répugnance de la foule.
(…)
Jardins familiaux. Rue d'Amiens, Pierrefitte-sur-Seine, Seine-Saint-Denis. |
Il n'est pas un Parisien qui ne connaisse la presqu'île de Gennevilliers, de nom, à vrai dire, plus que de fait. Combien peu d'entre nous ont visité ce coin de terre et s'y sont arrêtés ! On en parle ; on n'y va pas.
Si vous voulez bien vous reporter à n'importe quelle carte des environs de Paris, vous aurez l'explication de ce mystère.
(…)
C'est donc un pays parfaitement isolé, et qui jusqu'en ces dernières années était resté, pour ainsi dire, en dehors de toute civilisation. Les habitants, j’allais dire les indigènes, tenaient quelque peu du sauvage.
Beaucoup n'étaient jamais sortis de leur presqu'île et ne connaissaient que par ouïe-dire Paris, qu'ils touchaient en quelque sorte de la main. Ils avaient gardé les mœurs farouches qu'on ne trouve plus que dans certains villages perdus, au fond de provinces montagneuses et difficiles d'accès.
Il faut dire aussi que la terre où habitaient ces pauvres gens n'était pas riche et ne pouvait fournir à de nombreux échanges.
(…)
Tel était donc l'état de cette presqu'île de Gennevilliers il y a quelques années.
A deux kilomètres de Paris, à une portée de fusil d'Asnières, elle était une sorte d'oasis de la barbarie en pleine civilisation. La population, qui était peu dense, cultivait tant bien que mal un sol rebelle. Elle n'avait qu'à gratter la terre pour rencontrer le sable stérile et l'aride caillou. Quelques maisons de campagne avaient poussé çà et là autour de Gennevilliers même ; mais c'était par exception, car l'émigration de la bourgeoisie parisienne en quête de villas passait à côté et poussait généralement plus loin.
Les personnes qui s'y étaient arrêtées n'avaient pu être séduites que par le bon marché des terrains.
Il semblait que ce pays, frappé d'une sorte de malédiction, ne dût jamais se relever de cette déchéance, lorsque, en 1866, la Commission des égouts de Paris le choisit pour théâtre d'une expérience qui devait en changer heureusement la face.
Jardins familiaux. Pierrefitte-sur-Seine, Seine-Saint Denis. |
Allez vous-en à Clichy-la-Garenne ; la promenade n'est pas longue ; et si vous ne voulez pas y aller à pied ou en voiture, prenez tout simplement le chemin de fer d'Asnières. Une fois là, rendez-vous à l'endroit où Paris, par l'énorme bouche du collecteur de Clichy, verse dans la Seine le torrent souverain de ses eaux d'égout.
Ce n'est pas, je l'avoue, un spectacle bien attrayant : il répugne à l'odorat comme à la vue, mais il est curieux, et vous ne vous ferez une idée juste de l'importance de la question que si vous avez regardé un instant le fleuve à ce point de jonction.
En amont, les eaux sont limpides ; elles miroitent gaiement sous le soleil et invitent à s'y baigner. Vous les voyez aussitôt changer de couleur. On ne peut pas dire précisément qu'elles noircissent ; elles prennent cet aspect plombé que revêt le ciel un jour d'orage ; Une sorte d'huile grasse, tirant sur le roux, se répand sur toute la surface de l'eau, de l'une à l'autre rive. Il semble que le fleuve charrie plus péniblement un liquide épais, chargé de cadavres puants et de détritus infects.
A vos pieds, à la bouche même de l'égout, ce sont de vastes nappes d'une matière noirâtre et vaseuse, dont l'odeur ne peut se soutenir. Aussi loin que les yeux peuvent porter en aval, on voit couler lentement une sorte de bouillie morne, qui s'éclaire parfois, sous un rayon de soleil, de reflets glauques. Suivez le cours de la Seine, descendez jusqu'à Chatou et à Bougival, c'est à peine si l'eau, dans ce long parcours, a eu le temps de s'éclaircir. Qui de vous, aimables habitués de la Grenouillère, ne se rappelle le regard appréhension mélancolique qu'il a jeté sur cette eau brouillée, avant de piquer une tête dans ce qu'il appelait la limonade ?
(…)
La grenouillère, peinture de Claude Monet, 1869 (collection du MET). C'était un établissement de bain et de canotage situé à Croissy sur Seine, Yvelines. |
Irrigation à Gennevilliers dans les annnées 20'. |
Des vestiges de ces épandages subsistent. Ici à Pierrelaye, Val d'Oise. |
Ce n'est pas dans une feuille qu n'a pas la prétention d'être spéciale en ces matières qu'il convient de donner les analyses chimiques à l'aide desquelles les savants ont établi le degré du pouvoir fertilisant des eaux d'égout parisiennes. Un seul détail vous en donnera une idée. Vous n'êtes pas sans avoir vu, et surtout sans avoir senti, dans la plaine d'Argenteuil, des énormes tas d'immondices, de gadoue, dont les vignerons se servent pour fumer leurs vignes. Cette gadoue n'est autre chose que de la boue de Paris avec ses résidus. Elle se vend fort cher et constitue un assez bon engrais. L'eau d'égout lui est infiniment supérieure, et nous la jetons à la Seine.
Cette seule considération suffirait à faire repousser un projet dont les parisiens ont plus d'une fois causé :
Il s'agirait de construire un égout qui longerait la Seine dans tout son parcours et porterait à la mer toutes les déjections de la grande ville : un fleuve de boue parallèle à l'autre. Ce serait dépenser des centaines de millions pour se donner le moyen d'en perdre des centaines d'autres.
C'est une pure folie à laquelle les ingénieurs n'ont jamais sérieusement songé.
(…)
Je vous suppose propriétaire à Gennevilliers ; on vient vous dire :
« Monsieur, votre terrain est exécrable, il n'y pousse rien ; nous allons, si vous le permettez, y verser tous les jours de l'eau d'égout, vous savez bien, cette eau noirâtre et infecte que vous voyez à Asnières sortir du grand collecteur, etc. »
Vous ne laisseriez pas à coup sûr achever la phrase. « Jamais de la vie ! »vous écririez vous.
On aurait beau vous remontrer que cette eau d'égout est un engrais très puissant ; que vous pourrez, grâce à lui, cultiver tout ce qui vous plaira ; que vous enverrez au marché des choux énormes, des carottes monstrueuses et de délicieux navets.
Tous ces beaux raisonnements ne vous vous convaincraient point. « De l'eau d'égout ! Ah ! bien, merci ! On veut nous empoisonner ! »
Ainsi parleriez-vous, monsieur, qui me lisez, et cependant vous êtes sans doute un homme instruit et par cela même libre de préjugés. L'éducation que vous avez reçue vous a mis à même d'écouter et de comprendre des arguments tirés de la science ; vous êtes capable de vous éclairer sur une question en étudiant les rapports des hommes compétents ; vous n'avez pas contre eux cette défiance bête du paysan, qui ne croit qu'à la routine et repousse de parti pris toute innovation.
Jugez un peu de la façon dont les naturels de Gennevilliers, les sauvages que je vous ai dépeints au premier chapitre, durent accueillir les propositions qui leur furent faites.
Ils reculèrent d'horreur.
On s'y attendait.
(…)
Je supplie mes lecteurs de se donner le plaisir d'un tour de promenade dans ce merveilleux jardin maraîcher. Il n'y a rien de plus curieux et, j'ose le dire, de plus amusant que ce spectacle. Les champs ressemblent à des étoffes rayées ; les rayures sont de petites rigoles, qui occupent toute la longueur des champs. L'eau d'égout est amenée, par les canaux souterrains de l'Administration, jusqu'à la lisière de chacun des champs.
Chaque propriétaire a son robinet qu'il ouvre et ferme à volonté. Le robinet est-il ouvert, on voit l'eau qui s'engage dans toutes ces petites rigoles, le flot poussant le flot, jusqu'à ce qu'elle atteigne le bout. Le cultivateur n'a plus qu'à fermer le robinet, et la distribution s'arrête. L'eau filtre lentement à travers le terrain qu'elle rafraîchit et qu'elle engraisse.
(…)
Irrigations de la presqu'île de Gennevilliers. |
Quelque extension que puisse encore prendre la Ville de Paris, l'épuration intégrale de toutes les eaux d'égout est assurée pour plusieurs siècles, grâce à ce projet ;
M. Durand-Claye croit même que l'on pourra, quand il sera exécuté, verser directement à l'égout toutes les matières de vidanges, qui prendront le même chemin.
Mais ça, c'est une autre question, qui demanderait de longs développements, et qui ne pourra être utilement abordée que lorsque les champs d'épuration fonctionneront aux environs d'Achères, comme dans la presqu'île de Gennevilliers.
Les odeurs de Paris / Francisque Sarcey, 1882
Zones d'épandage de la presqu'île de Gennevilliers en 1876. Débutée en 1869 avec un jardin modèle à Asnières appartenant à la Ville de Paris, l'expérience a concerné 795 ha en 1897. Elle a couvert 6000 ha au total avec les zones d'épandage de Pierrelaye, Poissy, Triel, Achères. |
L'épandage des eaux de la ville de Paris a posé de multiples problèmes et a rencontré de vives oppositions. Les historiens actuels, qui revalorisent les discours "technocritiques", présentent volontiers cet épisode comme la lutte du pot de fer parisien qui devait coûte que coûte trouver un solution à un problème d'évacuation devenu dramatique, contre les pots de terres des petites municipalités voisines, peuplées, comme l'écrivait Sarcey, d'indigènes. L'urbanisation et la pollution chimique d'eaux devenues inutilisables a fait abandonner cette technique dans l'entre-deux-guerres.
- Sur le site de la ville de Gennevilliers : Le temps des maraîchers
- Histoire urbaine, 2005 : Experts contre experts : les champs d'épandage de la ville de Paris dans les années 1870
- L’environnement et La science : Débordement des eaux usées à Gennevilliers, 1870-1880 (p. 56-73
- Etude archivistique et historique du fonds d’archives (...) traitant des travaux d’adduction d’eau et d’épurations opérés par la ville de Paris dans l’ancien département de Seine-et-Oise. (p. 44-130)
- Le dernier maraîcher de Pierrefitte-sur-Seine : René Kersanté, un maraîcher à l'ombre des tours
Vous connaissez sûrement ce passage dans Les Misérables, où Hugo chante les mérites de l'engrais humain. Ce blog est décidément toujours aussi passionnant!
RépondreSupprimerMerci. Je ne me souviens pas du passage des Misérables en question, mais je vais le rechercher. Traité par Hugo, je ne doute pas que ce soit grandiose.
RépondreSupprimerCes tas d’ordures au coin des bornes, ces tombereaux de boue cahotés la nuit dans les rues, ces affreux tonneaux de la voirie, ces fétides écoulements de fange souterraine que le pavé vous cache, savez-vous ce que c’est ? C’est de la prairie en fleur, c’est de l’herbe verte, c’est du serpolet, du thym et de la sauge, c’est du gibier, c’est du bétail, c’est le mugissement satisfait des grands bœufs le soir, c’est du foin parfumé, c’est du blé doré, c’est du pain sur votre table, c’est du sang chaud dans vos veines, c’est de la santé, c’est de la joie, c’est de la vie. Ainsi le veut cette création mystérieuse qui est la transformation sur la terre et la transfiguration dans le ciel. Rendez cela au grand creuset ; votre abondance en sortira. La nutrition des plaines fait la nourriture des hommes...
RépondreSupprimerbonjour, je suis un étudiant bresilien qui recheche sur ce sujet. J'ai besoin d'information sur Gennevilliers..
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