Sépulture Robertson, Étienne-Gaspard. Cimetière du Père Lachaise, VII-8 |
Où le physicien Robertson, usant de sa science de l'optique, plonge son public dans la terreur, voire la Terreur
FANTASCOPE s. m. (fan-ta-sko-pe — du gr. phantasma, fantôme; skoped, j'examine). Physiq. Appareil de fantasmagorie.
Encycl. Nous donnons la description de cet appareil d'après celle qu'a laissée l'inventeur, Robertson, dans ses Mémoires.
Le fantascope se compose d'une caisse en bois de 0m,60 à 0m,70 dans tous les sens, montée sur une table à roulettes qu'on peut diriger à volonté. Dans l'intérieur est une lampe munie d'un réflecteur parabolique, dont la lumière est dirigée suivant l'axe d'un tuyau. Le courant d'air nécessaire à la combustion de la lampe pénètre par une ouverture pratiquée dans la partie inférieure de la boîte, et sort par une cheminée placée au-dessus de l'appareil.
Entre ce tuyau et le corps de la boite se trouve un intervalle vide, dans lequel on glisse un tableau où sont représentés les sujets qui doivent former le spectacle. La lumière projetée par la lampe, après avoir traversé ce tableau, tombe sur un verre plan convexe, dont le côté plan est tourné vers le tableau, et qui a 0m,10 à 0m,12 de diamètre et autant de foyer. Elle rencontre ensuite un objectif de 0m,030 à 0m,035 de diamètre et de 0m,07 à 0m,08 de foyer. On peut, au moyen d'une disposition trés-ingénieuse, augmenter ou diminuer la quantité de lumière qui frappe cet objectif, et, par là, on ajoute singulièrement à l'illusion du spectateur.
La salle dans laquelle se donne le spectacle doit avoir 20 à 25 mètres de longueur sur 7 à 8 mètres de largeur. La partie que le public doit occuper est peinte en noir et entièrement obscure. Les deux parties sont séparées par un rideau de percale fine bien tendue, enduit d'un vernis composé d'amidon blanc et de gomme arabique, vernis qui le rend diaphane. C'est sur ce rideau que viennent se
peindre les images. Un rideau d'étoffe noire dissimule le fantascope à la vue des spectateurs dans les moments où il ne fonctionne pas. Pour montrer des fantômes vivants, dit M. L. Figuier, Robertson se servait d'une modification particulière de l'instrument connu en physique sous le nom de mégascope. En faisant usage de deux appareils de ce genre, établis l'un en avant et l'autre en arrière du rideau, on projetait sur ce rideau, d'un côté un paysage, un cloître, un cimetière, etc., et de l'autre côté une ombre mobile, qui se promenait au milieu du tableau. C'est ainsi que Robertson exécutait, par exemple, l'apparition de la Noite sanglante. Il y avait encore les fantômes de la fumée; on les produisait en faisant tomber les images du fantascope sur la vapeur onduleuse et légère qui s'élevait d'un brasier dans lequel on avait jeté quelques grains d'encens.
Nous citerons encore l'anecdote suivante racontée par Robertson lui-même dans ses Mémoires « Souvent des jeunes gens venaient me demander l'ombre de leur fiancée, des femmes celle de leur mari, des jeunes personnes surtout celle de leur mère. Tout en écoutant le récit de leurs peines, dit-il, je désabusais leur crédulité. Mes efforts restèrent cependant infructueux devant l'exaltation d'une femme dont le mari m'avait été connu. Il était maître de musique de la chapelle de Versailles. Son épouse, inconsolable de sa mort, conçut l'espoir que je pourrais faire apparaître son ombre devant elle ; ce fut dès lors une idée fixe que rien ne put affaiblir. Elle m'accusait de prendre plaisir à prolonger et à accroître sa douleur par mon refus. Je voyais une femme près de perdre la raison ; je m'adressai au bureau de police, et je demandai la permission d'adoucir le chagrin de cette femme en complétant une erreur qu'on ne pourrait dissiper qu'en la réalisant. Cette permission me tut accordée, Je m'appliquai à la bien persuader que, si cette évocation était possible, le pouvoir n'en existait que pour en faire usage une seule fois. Je dessinai de souvenir les traits de son mari, certain que l'imagination malade de la spectatrice ferait le reste. En effet, l'ombre parut à peine qu'elle s'écria « O mon mari » mon cher mari, je te revois. C'est toi reste, reste, ne me quitte pas si tôt. » L'ombre s'était approchée presque sous ses yeux; elle voulut se lever, mais l'ombre disparut, et alors elle resta interdite, puis versa des larmes abondantes. Sa douleur était plus tendre. Elle me remercia d'une manière expressive, dit qu'elle avait la certitude que son mari l'entendait, la voyait encore, que ce lui serait toute sa vie un douce consolation. »
Les effets produits par l'appareil de Robertson furent trouvés prodigieux, dans un temps où rien n'était ordinaires. L'imagination stupéfiée de nos pères eût jugé ridicule de faire honneur à quelques morceaux de verre, taillés et disposés suivant certains principes d'optique, des apparences merveilleuses qu'elle admirait. On voulut y voir l'intervention d'artifices surnaturels, témoin ce récit d'une séance racontée dans l'Ami des lois du 8 terminal an VI (28 mars 1798) : « Ensuite, un homme en désordre, les cheveux hérissés, l'œil triste et hagard, dit : « Puisque je n'ai pu, dans un journal officiel, rétablir le culte de Marat, je voudrais au moins voir son ombre... » Pour se conformer au désir qui lui est exprimé, Robertson verse sur un réchaud enflammé deux verres de sang, une bouteille de vitriol, douze gouttes d'eau-forte et deux exemplaires du Journal des Hommes libres. Aussitôt s'élève peu à peu un petit fantôme livide, hideux, armé d'un poignard et couvert d'un bonnet rouge. L'homme aux cheveux hérissés le reconnaît pour Marat ; il veut l'embrasser; le fantôme fait une grimace effroyable et disparaît.»
Dans cette recette infaillible pour faire revenir l'ombre de Marat, un point essentiel a été oublié par le narrateur c'est que le portrait du féroce terroriste avait été préalablement peint sur le tableau dont nous avons parlé, et que l'homme aux cheveux hérissés était... un compère.
Dans les temps modernes, la fantasmagorie a été perfectionnée par M. Charles Chevalier, ingénieur-opticien au Palais-Royal, et par M. Robin, dont les soirées de physique amusante sont si remplies de surprises et d'attraits.
Le fantascope se compose d'une caisse en bois de 0m,60 à 0m,70 dans tous les sens, montée sur une table à roulettes qu'on peut diriger à volonté. Dans l'intérieur est une lampe munie d'un réflecteur parabolique, dont la lumière est dirigée suivant l'axe d'un tuyau. Le courant d'air nécessaire à la combustion de la lampe pénètre par une ouverture pratiquée dans la partie inférieure de la boîte, et sort par une cheminée placée au-dessus de l'appareil.
Entre ce tuyau et le corps de la boite se trouve un intervalle vide, dans lequel on glisse un tableau où sont représentés les sujets qui doivent former le spectacle. La lumière projetée par la lampe, après avoir traversé ce tableau, tombe sur un verre plan convexe, dont le côté plan est tourné vers le tableau, et qui a 0m,10 à 0m,12 de diamètre et autant de foyer. Elle rencontre ensuite un objectif de 0m,030 à 0m,035 de diamètre et de 0m,07 à 0m,08 de foyer. On peut, au moyen d'une disposition trés-ingénieuse, augmenter ou diminuer la quantité de lumière qui frappe cet objectif, et, par là, on ajoute singulièrement à l'illusion du spectateur.
La salle dans laquelle se donne le spectacle doit avoir 20 à 25 mètres de longueur sur 7 à 8 mètres de largeur. La partie que le public doit occuper est peinte en noir et entièrement obscure. Les deux parties sont séparées par un rideau de percale fine bien tendue, enduit d'un vernis composé d'amidon blanc et de gomme arabique, vernis qui le rend diaphane. C'est sur ce rideau que viennent se
peindre les images. Un rideau d'étoffe noire dissimule le fantascope à la vue des spectateurs dans les moments où il ne fonctionne pas. Pour montrer des fantômes vivants, dit M. L. Figuier, Robertson se servait d'une modification particulière de l'instrument connu en physique sous le nom de mégascope. En faisant usage de deux appareils de ce genre, établis l'un en avant et l'autre en arrière du rideau, on projetait sur ce rideau, d'un côté un paysage, un cloître, un cimetière, etc., et de l'autre côté une ombre mobile, qui se promenait au milieu du tableau. C'est ainsi que Robertson exécutait, par exemple, l'apparition de la Noite sanglante. Il y avait encore les fantômes de la fumée; on les produisait en faisant tomber les images du fantascope sur la vapeur onduleuse et légère qui s'élevait d'un brasier dans lequel on avait jeté quelques grains d'encens.
Nous citerons encore l'anecdote suivante racontée par Robertson lui-même dans ses Mémoires « Souvent des jeunes gens venaient me demander l'ombre de leur fiancée, des femmes celle de leur mari, des jeunes personnes surtout celle de leur mère. Tout en écoutant le récit de leurs peines, dit-il, je désabusais leur crédulité. Mes efforts restèrent cependant infructueux devant l'exaltation d'une femme dont le mari m'avait été connu. Il était maître de musique de la chapelle de Versailles. Son épouse, inconsolable de sa mort, conçut l'espoir que je pourrais faire apparaître son ombre devant elle ; ce fut dès lors une idée fixe que rien ne put affaiblir. Elle m'accusait de prendre plaisir à prolonger et à accroître sa douleur par mon refus. Je voyais une femme près de perdre la raison ; je m'adressai au bureau de police, et je demandai la permission d'adoucir le chagrin de cette femme en complétant une erreur qu'on ne pourrait dissiper qu'en la réalisant. Cette permission me tut accordée, Je m'appliquai à la bien persuader que, si cette évocation était possible, le pouvoir n'en existait que pour en faire usage une seule fois. Je dessinai de souvenir les traits de son mari, certain que l'imagination malade de la spectatrice ferait le reste. En effet, l'ombre parut à peine qu'elle s'écria « O mon mari » mon cher mari, je te revois. C'est toi reste, reste, ne me quitte pas si tôt. » L'ombre s'était approchée presque sous ses yeux; elle voulut se lever, mais l'ombre disparut, et alors elle resta interdite, puis versa des larmes abondantes. Sa douleur était plus tendre. Elle me remercia d'une manière expressive, dit qu'elle avait la certitude que son mari l'entendait, la voyait encore, que ce lui serait toute sa vie un douce consolation. »
Les effets produits par l'appareil de Robertson furent trouvés prodigieux, dans un temps où rien n'était ordinaires. L'imagination stupéfiée de nos pères eût jugé ridicule de faire honneur à quelques morceaux de verre, taillés et disposés suivant certains principes d'optique, des apparences merveilleuses qu'elle admirait. On voulut y voir l'intervention d'artifices surnaturels, témoin ce récit d'une séance racontée dans l'Ami des lois du 8 terminal an VI (28 mars 1798) : « Ensuite, un homme en désordre, les cheveux hérissés, l'œil triste et hagard, dit : « Puisque je n'ai pu, dans un journal officiel, rétablir le culte de Marat, je voudrais au moins voir son ombre... » Pour se conformer au désir qui lui est exprimé, Robertson verse sur un réchaud enflammé deux verres de sang, une bouteille de vitriol, douze gouttes d'eau-forte et deux exemplaires du Journal des Hommes libres. Aussitôt s'élève peu à peu un petit fantôme livide, hideux, armé d'un poignard et couvert d'un bonnet rouge. L'homme aux cheveux hérissés le reconnaît pour Marat ; il veut l'embrasser; le fantôme fait une grimace effroyable et disparaît.»
Dans cette recette infaillible pour faire revenir l'ombre de Marat, un point essentiel a été oublié par le narrateur c'est que le portrait du féroce terroriste avait été préalablement peint sur le tableau dont nous avons parlé, et que l'homme aux cheveux hérissés était... un compère.
Dans les temps modernes, la fantasmagorie a été perfectionnée par M. Charles Chevalier, ingénieur-opticien au Palais-Royal, et par M. Robin, dont les soirées de physique amusante sont si remplies de surprises et d'attraits.
Séance de fantasmagorie. Image extraite des Mémoires récréatifs, scientifiques et anecdotiques du physicien-aéronaute E.G. Robertson, Paris, 1831-1833 |
www.cceae.umontreal.ca/IMG/pdf/CEL_0102.pdf
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tienne-Gaspard_Robert
http://www.arts-et-metiers.net/musee.php?P=157&id=10321&lang=fra&flash=f
Un documentaire de Jerome Prieur sur l'aube du cinéma dans lequel Robertson tient une place de choix.
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